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Peintre
de l'insolite au quotidien.
L'insolite caché au cœur du quotidien est une des multiples facettes
de la peinture de Jacques Gaulme . Comme beaucoup de ses contemporains,
sa recherche dérive du constat que l'homme moderne vit au milieu
d'individus ou d'objets qu'il a cessé de voir ou qu'il ne désire
plus regarder du fait de leur banalité ou de leur trivialité.
Il appartient au peintre de nous faire redécouvrir ces êtres
et ces choses qui nous entourent et de dénicher l'étrangeté
poétique qui les habite dans leur banalité quotidienne.
Pour nous faire redécouvrir la richesse de l'univers qui nous
entoure, Jacques Gaulme a volontiers recours à deux procédés,
la déformation des corps et la juxtaposition d'objets d'apparence
hétérogène. La déformation des corps représentée
par les toiles intitulées "Portrait d'un libraire d'occasion",
"Hommage à Sainte Anna Morphose" ou "Le
jeu de la miséricordieuse d'Ariano Suassuna ",
nous amène à nous interroger sur la nature des êtres,
qui sont parfois à la limite de l'humain et de l'animal. La déformation
des corps peut aussi avoir pour origine les horreurs de la guerre ("Honneur
au peuple souverain"), ou les méfaits de l'âge
("Fin de siècle=rideau !"). En revanche, l'humour
et la gaîté peuvent dominer, dans des toiles caricaturales
et expressionnistes comme "Le parquet de danse lors de
la fête à Bizeneuille en 1935", ou "Pour
l'artiste, à votre bon cœur". La mise en relation d'objets
hétéroclites permet de faire revivre des objets qui n'appartiennent
plus à notre réalité quotidienne mais qui n'ont
pas rompu toutes leurs amarres avec notre monde ("L'atelier").
Derrière la désinvolture se cache une inquiétude
existentielle profonde. Il ne nous est pas interdit de penser à
la signification allégorique de la plupart des toiles. Les objets
du quotidien utilisés provoquent des rapprochements inattendus,
les contraires sont associés dans ce qu'on pourrait regarder
comme une affirmation de nihilisme, dans le goût dadaïste,
comme dans "Scénographie", où l'on aperçoit
un bâtiment modeste qui se dresse dans les gradins d'un théâtre
à la représentation futuriste. Comme souvent il s'agit
pour le peintre, d'une façon dialectique, d'associer ironiquement
les contraires.
Christine
et Michel Mazoyer, juillet 2001. |
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